C’est le plus souvent dans les lieux privatifs de liberté tels que les centres de détention qu’on a recours à la torture et aux mauvais traitements. Afin d’assurer la protection des droits humains en détention, différentes normes juridiques existent. Rassemblées dans une base de données en ligne nommée « Focus Détention », elles forment un cadre normatif basé sur l’humanité des pratiques de détention.
La base de données en ligne « Focus Détention » a été développée par l’Association pour la prévention de la torture (APT), une association suisse basée à Genève qui œuvre depuis maintenant 40 ans. Ses activités mènent, entre autres, à la diffusion de normes et d’instruments pour soutenir les organismes publics et non gouvernementaux dans leurs efforts pour la prévention de la torture. Parmi ces instruments, « Focus Détention » fait l’objet d’un site web spécialisé visant à orienter les différents praticiens dans leurs efforts pour humaniser l’univers carcéral.
La structure de « Focus Détention » s’articule autour d’une quarantaine de problématiques qu’on retrouve en milieu carcéral : entre autres, l’isolement cellulaire, la privation d’eau et de nourriture ou encore, l’usage de la force. Les rubriques des fiches de problématiques offrent des descriptions et analyses sous l’angle des droits humains, documentent les normes juridiques et présentent des grilles d’évaluation à l’usage des responsables de monitoring. Et puisque des types de vulnérabilités peuvent aggraver l’atteinte à la dignité comme le genre, l’état de santé ou l’âge, on peut aussi consulter « Focus Détention » selon une problématique et une vulnérabilité, par exemple l’isolement cellulaire dans le cas de personnes aux prises avec un handicap.
Au départ, « la vulnérabilité concerne l’ensemble de la population privée de liberté ». Cependant, « certaines personnes ou groupes de personnes détenues se retrouvent dans des situations de vulnérabilité particulière qui exigent une attention et une protection additionnelles ». Dans la base de données « Focus Détention », ces catégories de vulnérabilité sont divisées en six groupes à risque : les enfants, les femmes, les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres ou intersexuées (LGBTI), les personnes souffrant d’un handicap physique ou mental ainsi que les personnes étrangères et les personnes issues de minorités ethniques ou de peuples indigènes.
Afin de justifier ce cadre normatif, plusieurs normes juridiques sont listées pour chacune des problématiques. Ces normes compilent un ensemble de textes juridiques issus des Nations unies comme la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ou la Convention relative aux droits des enfants, ainsi que des textes provenant d’autres instances telles que la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture de même que les rapports du Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Parmi toutes ces normes, on trouve un texte particulièrement intéressant : Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus, plus connu sous le nom de Règles Nelson Mandela, en l’honneur du défenseur des droits de la personne. Ces règles ont été adoptées en décembre 2015 par l’Assemblée générale des Nations unies. Elles ont été établies à partir de l’ensemble des règles internationales et des règles nationales existant déjà dans chaque pays. Elles s’appuient également sur les progrès constants réalisés dans le domaine pénitentiaire et dans les bonnes pratiques qui y sont liées. Ces Règles Nelson Mandela forment les conditions de base jugées acceptables par les Nations unies. Les États ont donc la possibilité de les adapter à leur propre cadre juridique.
Ainsi, comme nous venons de le souligner, des normes juridiques permettent d’assurer que les problématiques de la détention ne se transforment pas en occasions de torture ou de mauvais traitements. Il n’en demeure pas moins que les lieux privatifs de liberté doivent faire l’objet d’une surveillance vigilante. À ce sujet, il y a le Protocole facultatif à la Convention contre la torture (OPCAT) qui programme des mécanismes nationaux de prévention indépendants pouvant faire des visites inopinées dans les lieux privatifs de liberté. Dans la foulée, « Focus Détention » constitue aussi une référence pour le développement des pratiques de détention qui respectent les droits des personnes incarcérées.

Par Nancy Labonté, coordonnatrice, et Andréa Torrent, stagiaire

Source

Association pour la prévention de la torture. Focus Détention. www.apt.ch/detention-focus/fr