Francisco de Jesús Espinosa Hidalgo est un paysan indigène tsotsil de 69 ans. Son engagement contre des mégaprojets de développement dans sa région du Chiapas lui a vraisemblablement valu d’être torturé et maintenu en détention dans des conditions indignes pendant plus de trois ans. Aujourd’hui libre, il se bat pour que ses tortionnaires soient condamnés et pour obtenir réparation.
Emprisonné pour avoir défendu sa communauté
Francisco de Jesús Espinosa Hidalgo, 69 ans, est un paysan indigène tsotsil de Venustiano Carranza, au cœur du Chiapas, pour qui nous sommes intervenus en février dernier. Leader au sein de sa communauté, il a longtemps défendu la propriété collective et l’agriculture vivrière des terres de sa communauté, notamment face à de grands projets miniers et de monocultures. Son engagement a vraisemblablement fait de lui une cible. L’ONG mexicaine Frayba rapporte que, en mai 2015, des policiers l’arrêtent et le torturent. Après l’avoir déshabillé, ils le rouent de coups et lui infligent des décharges électriques pour l’obliger à signer des aveux de culpabilité dans une affaire de vol avec violence. Francisco est ensuite placé en détention à 130 kilomètres de ses proches, dans la prison d’El Amate. Là-bas, sa santé se dégrade rapidement : il survit dans des conditions de détention indignes. Dépression, douleurs récurrentes, diabète, pertes de mémoire, dysfonctionnement de la prostate… Il n’a eu accès à aucun soin. Le 21 septembre 2018, en l’absence totale de preuves, Francisco est enfin libéré. Cependant, le combat ne peut s’arrêter là : ses tortionnaires et leurs complices doivent être jugés. L’homme bientôt septuagénaire a aussi besoin d’être soigné des conséquences des actes de torture dont il a été victime.
Des minorités martyrisées
À l’instar de Francisco, les populations autochtones sont marginalisées au Mexique. Du fait de leur culture, de leur identité et de leur mode de vie traditionnel, elles demeurent plus discriminées et criminalisées que le reste de la population. L’ONU estime que 71,9 % de la population indigène vit dans la pauvreté ou l’extrême pauvreté, contre 40,6 % de la population au niveau national. Une minorité d’entre eux sont comptabilisés officiellement : 6,5 % de la population. Pourtant, 21,5 % des Mexicains s’auto-identifient comme autochtones.
Du fait de cette exclusion sociale, les indigènes subissent en toute impunité les exactions et intimidations de la police : arrestations arbitraires, contrôles au faciès, etc. Ces opérations visent à freiner leurs revendications et à les empêcher d’exercer leurs droits. Ces victimes font des coupables idéaux. Dans l’écrasante majorité des cas, elles sont arrêtées sans mandat et torturées jusqu’à la signature d’aveux de culpabilité dans des affaires criminelles que les autorités cherchent à boucler rapidement. Leur défense est souvent bâclée par des avocats commis d’office à la solde de l’accusation, et en l’absence d’interprète, alors que très peu d’entre eux comprennent l’espagnol. Les juges restent indifférents aux dénonciations de torture et ordonnent leur condamnation. Une fois en prison, de nombreux détenus autochtones se voient refuser l’accès aux soins.
Contexte de l’intervention
Bien que libéré depuis le mois de septembre, Francisco de Jesús Espinosa Hidalgo se bat pour que cesse l’impunité et pour être indemnisé. Puisque le Mexique a ratifié la Convention contre la torture en 1986, le pays doit répondre des faits illicites de torture qui sont survenus en 2015 sur la personne de Francisco de Jesús et, de ce fait, il doit voir à ce que « tous les actes de torture constituent des infractions au regard de son droit pénal » (art. 4). Nous attendons que soient poursuivis les tortionnaires et leurs complices.
De plus, le Mexique est responsable de garantir à la victime « le droit d’obtenir réparation et d’être indemnisée équitablement et de manière adéquate, y compris les moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible » (art. 14). Les violences subies lors de son arrestation et en détention ont gravement et durablement porté atteinte à la santé physique et psychologique de Francisco de Jesús Espinosa Hidalgo. Nous exigeons donc qu’il soit reconnu comme victime de torture, et que le Mexique prenne en charge l’ensemble des soins exigés par son état de santé.
Source
ACAT France. 2018. J’agis pour Francisco. acatfrance.fr/actualite/j-agis-pour-francisco
Vous pouvez agir
Lettre d’action en format .pdf : Lettre pour le Mexique pdf 2018-11
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