Elena Ourlaïeva, militante renommée des droits humains, a été arrêtée le 31 mai 2015 pour avoir enquêté sur le travail forcé dans les champs de coton et elle a subi des violences génitales.
Vous pouvez agir : Appel à l’action
Parce qu’elle avait photographié les travailleurs exploités aux travaux forcés, les policiers l’ont arrêtée et amenée au poste de Chinaz (province de Tachkent, nord-est du pays) où on lui a confisqué son ordinateur portable et son appareil photo numérique. Elena Ourlaïeva témoigne qu’un des policiers l’a frappée à la tête en lui demandant où elle avait caché la carte mémoire de son appareil photo, car celle-ci contenait des preuves de violations des droits humains. Les autres policiers présents l’ont traitée d’« agente des États-Unis » et de traîtresse en l’accusant d’avoir vendu des secrets du gouvernement ouzbek à des pays étrangers.
Elle a de plus rapporté que les policiers ont fait venir des auxiliaires médicaux qui lui ont administré trois injections pour l’affaiblir. Elle a été déshabillée entièrement et soumise à deux examens vaginaux. Elle a d’abord été forcée à s’allonger sur un lit tandis qu’une femme médecin procédait à un examen interne de son vagin, soi-disant pour trouver la carte mémoire. Cette fouille n’étant pas concluante, des policiers l’ont placée de force sur une chaise. Ces derniers et un auxiliaire médical l’ont tenue par les bras et les jambes pendant que le médecin insérait un spéculum dans son vagin pour procéder à un second examen, qui l’a fait saigner.
Elle a également subi un examen anal. Ensuite, des policiers l’ont emmenée à un hôpital local pour lui faire passer une radiographie du thorax et de l’abdomen. À l’issue de cet examen, elle a demandé à aller aux toilettes, mais les policiers l’ont obligée à uriner sur l’herbe devant l’établissement. Ils l’ont filmée, photographiée et menacée de publier ces images sur Internet si elle se plaignait de son traitement.
Le 1er juin, Elena Ourlaïeva a manifesté devant le ministère de l’Intérieur, à Tachkent, en brandissant une pancarte sur laquelle elle demandait que les responsables soient traduits en justice. Des agents de sécurité sont alors sortis du bâtiment et l’ont conduite dans un bureau sans l’arrêter et ils ont accepté sa plainte. Elle a également transmis sa plainte au bureau du procureur de Tashkent et au ministère de l’Intérieur. Néanmoins, aucune de ces démarches n’a donné de résultats jusqu’ici.
Elle défend les droits humains avec courage et persévérance
Elena Ourlaïeva a régulièrement dénoncé le recours au travail forcé au moment de la récolte du coton ainsi que les conditions inhumaines et dégradantes auxquelles étaient soumis les travailleurs. Elle fait partie des rares défenseurs des droits de la personne qui restent et travaillent en Ouzbékistan. Elle mène des investigations et écrit des articles pour la communauté internationale qui traitent de questions relatives aux droits humains. Elle travaille activement avec d’autres défenseurs des droits humains en Ouzbékistan et à l’étranger.
Elle a été arrêtée à plusieurs reprises dans le passé et placée en détention ou internée de force en hôpital psychiatrique.
Torture endémique
L’Ouzbékistan est l’un des États les plus autoritaires au monde qui est reconnu pour ses violations graves et systématiques des droits humains, notamment pour le recours généralisé à la torture et pour l’imposition de mauvais traitements infligés aux détenus par les forces de sécurité. Ce pays a adhéré à la Convention contre la torture des Nations Unies en 1995.
Au cours des cinq dernières années, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a eu à se prononcer dans une vingtaine d’affaires d’extradition vers l’Ouzbékistan et a considéré que la pratique tortionnaire y demeurait « systématique », « impunie » et « encouragée ». Pourtant, les représentants de l’État persistent à nier tout recours à ces pratiques.
En 2013, le Comité contre la torture (ONU) «relève avec préoccupation les allégations nombreuses, persistantes et cohérentes faisant état d’un recours routinier à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements par des agents de la force publique, des enquêteurs et des agents pénitentiaires ou bien à leur instigation ou avec leur consentement, souvent dans le but d’extorquer des aveux ou des informations aux fins de l’action pénale» [CAT/C/UZB/CO/4 -10 décembre 2013]
Sources
ACAT-France. Rapport de l’ACAT, mars 2015, en ligne : http://www.acatfrance.fr/un-monde-tortionnaire/ouzbekistan-rapport-2015
Comité contre la torture. Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de l’Ouzbékistan, CAT/C/UZB/CO/4, 10 décembre 2013, en ligne : http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CAT/C/UZB/CO/4&Lang=Fr
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Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Pratique généralisée de la torture et des mauvais traitements
Le Comité relève avec préoccupation les allégations nombreuses, persistantes et cohérentes faisant état d’un recours routinier à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements par des agents de la force publique, des enquêteurs et des agents pénitentiaires ou bien à leur instigation ou avec leur consentement, souvent dans le but d’extorquer des aveux ou des informations aux fins de l’action pénale. Tout en reconnaissant que l’État partie n’est pas soumis à la juridiction de la Cour européenne des droits de l’Homme, le Comité note qu’en 2011, la Cour a affirmé que «le recours à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements contre des détenus, en Ouzbékistan, est systématique, impuni et encouragé par les agents de la force publique et des forces de sécurité». Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie ait qualifié d’«infondées» de nombreuses plaintes pour actes de torture mentionnées durant l’examen, dont certaines avaient déjà été examinées par d’autres mécanismes de protection des droits humains des Nations Unies.
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Le Comité note que si l’État partie a signalé que 45 personnes avaient été poursuivies pour actes de torture entre 2010 et 2013, il a, au cours de la même période, enregistré 336 plaintes pour torture ou mauvais traitements mettant en cause des agents de la force publique. Le Comité accueille avec satisfaction les informations fournies par l’État partie indiquant que les pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif s’emploient à combattre la torture, mais il s’inquiète de n’avoir reçu aucune information permettant de penser que des représentants du pouvoir exécutif auraient récemment condamné publiquement la torture ou adressé directement un message aux policiers et au personnel pénitentiaire pour condamner de tels agissements (art. 4, 12, 13, 15 et 16). [Comité contre la torture. Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de l’Ouzbékistan, CAT/C/UZB/CO/4][/one_half_last]