À la suite de l’arrestation à Vancouver en décembre 2018 de Meng Wanzhou, une dirigeante du géant chinois des télécommunications Huawei, plusieurs Canadiens ont été arrêtés par les autorités chinoises. La plupart ont été libérés, à l’exception de Michael Spavor et Michael Kovrig. L’ACAT Canada s’inquiète de leur sort, du fait qu’ils sont comme pris en otage sur un fond de dispute économique et diplomatique entre le Canada, les États-Unis et la Chine [1].
Treize Canadiens auraient été arrêtés et la plupart d’entre eux, relâchés, dans la foulée de « l’interpellation début décembre à Vancouver de la directrice financière du géant chinois des télécommunications Huawei, Meng Wanzhou, à la demande de la justice américaine » [2]. De ces opérations subsiste la détention de deux personnes : Michael Kovrig, ancien diplomate canadien œuvrant maintenant avec l’organisme International Crisis Group, et Michael Spavor, un consultant fréquemment en relation avec la Corée du Nord. Ces deux détenus sont manifestement au centre de mesures de rétorsion de la Chine à l’égard du Canada, mesures qui cesseraient rapidement si madame Meng Wanzhou était libérée sans plus d’accusation, affirme le Global Times, un journal aligné sur le parti communiste de la Chine [3].
Les deux ressortissants canadiens sont accusés d’espionnage (crimes reliés à la sécurité nationale [4]). Les efforts du Canada pour les faire libérer sont bien concrets, alors que la ministre des Affaires étrangères est récemment entrée en dialogue avec son homologue chinois [5]. Le Canada a fait une dizaine de visites consulaires pour s’assurer que les deux hommes ne subissent pas de mauvais traitements [6]. Des organismes et des chercheurs de partout dans le monde ont appelé à la libération des deux Canadiens [7].
Puisqu’ils n’ont pas été jugés dans les règles de l’art, et compte tenu du contexte tendu entre les deux pays, Ottawa parle d’une arrestation arbitraire [8]. À l’ACAT Canada, nous sommes d’avis que les deux ressortissants sont utilisés comme monnaie d’échange par Pékin, qui réclame la libération de Meng Wanzhou. Or, reléguer des citoyens au rang d’objets atteint leur dignité humaine, si l’on suit la logique kantienne [9]. Dans le contexte international, on peut qualifier cette détention de peine ou de traitement dégradant, au sens de l’article 16 de la Convention contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En effet, même si la définition des peines ou traitements dégradants n’est pas explicite dans la convention, il est possible de s’inspirer de la jurisprudence européenne [10], selon laquelle une peine dégradante ne nécessite pas de lésions physiques graves ou durables et consiste en un châtiment où la personne se voit « traiter en objet aux mains de la puissance publique » [11].
Puisque les droits de messieurs Spavor et Kovrig sont bafoués en vertu de la Convention contre la torture ratifiée par la Chine en 1988, nous vous suggérons d’écrire à l’ambassadeur de Chine aux Nations unies pour exiger qu’une enquête judiciaire soit menée selon les règles de l’art et que, s’ils sont reconnus coupables, ils puissent être rapatriés dans une prison canadienne et ne subissent pas la torture en détention, et que l’on cesse de traiter les Canadiens comme des pions sur l’échiquier des relations entre le Canada et la Chine.
Appel à l’action préparé par Nancy Labonté, coordonnatrice
Vous pouvez agir
Lettre d’action en format .pdf : Lettre pour la Chine pdf 2019-09
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Sources
Agence France-Presse. 2019. Treize Canadiens ont été détenus en Chine depuis le 1er décembre. Dans La Presse. www.lapresse.ca/international/asie-et-oceanie/201901/03/01-5209890-treize-canadiens-ont-ete-detenus-en-chine-depuis-le-1er-decembre.php [2]
Arrêt Tyrer c. Royaume-Uni, 25 avril 1978, § 33. actu.dalloz-etudiant.fr/fileadmin/actualites/pdfs/OCTOBRE_2014/AFFAIRE_TYRER_c._ROYAUMEUNI.pdf [11]
Comité éditorial du NY Times. 2018. China’s Canadian Hostages. Dans NY Times Dec. 24, 2018, section A, page 18, « The New York Times Opinion section ». www.nytimes.com/2018/12/23/opinion/editorials/china-canada-huawei-trump.html [1] (3)
Devers, Gilles. 2015. Les traitements inhumains et dégradants dans la jurisprudence de la CEDH. Sur le blogue Actualités du droit. lesactualitesdudroit.20minutes-blogs.fr/archive/2015/10/03/les-traitements-inhumains-et-degradants-dans-la-jurisprudenc-922572.html [10]
International Crisis Group [site Web de l’ONG]. www.crisisgroup.org/who-we-are/people/michael-kovrig [7]Parent, Stéphane. 2019. 10e visite consulaire pour le Canadien Michael Kovrig détenu en Chine. Sur le site de RCI Net. www.rcinet.ca/fr/2019/08/06/10e-visite-consulaire-pour-le-canadien-michael-kovrig-detenu-par-la-chine/ [4] [6]
Pech, Thierry. 2001. La dignité humaine. Du droit à l’éthique de la relation. Dans Revue internationale d’éthique sociétale et gouvernementale, vol. 3, no 2. journals.openedition.org/ethiquepublique/2526 [9]
Radio-Canada. 2019. Freeland a discuté avec son homologue chinois de Kovrig et Spavor. Sur le site de Radio-Canada. ici.radio-canada.ca/nouvelle/1245729/canada-chine-discussion-canadiens-emprisonnes-sommet-asean-bangkok [5] [8]