Le Dinh Luong détient un triste record : celui du défenseur des droits humains le plus lourdement condamné, avec 20 ans de réclusion. Son crime ? Avoir défendu les droits de populations vulnérables et agi pour la démocratie. Son pays, dirigé par le Parti communiste du Vietnam, au pouvoir sans interruption depuis 1976, ne tolère aucune critique.

Le Dinh Luong, défenseur et militant prodémocratie, a participé à diverses activités, y compris religieuses et environnementales, considérées comme politiquement inacceptables. Il a milité pour la libération de prisonniers d’opinion et soutenu leurs familles contre le harcèlement. Il visitait aussi des défenseurs des droits humains en prison. La police et des journaux l’ont accusé d’être un « dangereux réactionnaire » lié au Viet Tan, un réseau d’activistes vietnamiens pour la démocratie, considéré par les autorités comme un groupe terroriste.

En 2015 et 2016, il a soutenu les demandes de réparation des pêcheurs de la province de Nghe An, victimes directes de la pollution marine causée par l’aciérie taïwanaise Formosa. Il s’agit de la pire catastrophe écologique de toute l’histoire du pays, due aux tonnes de produits toxiques rejetés dans la mer, sur 200 kilomètres de côtes. En réponse, les autorités vietnamiennes ont écarté les plaintes et frappé les plaignants, et tentent toujours de faire taire des voix comme celle de Le Dinh Luong.

Le jour de son arrestation, le 24 juillet 2017, Le Dinh Luong et un autre ami activiste avaient visité la famille d’un prisonnier politique. Arrêtés par des hommes en civil, ils ont été battus puis poussés dans deux voitures différentes. Quelques jours plus tard, ils étaient accusés d’avoir « mené des activités visant à renverser l’administration populaire » (article 79 du Code pénal vietnamien). Le 16 août 2018, le verdict tombe : le Tribunal populaire condamne Le Dinh Luong à vingt ans de prison, la peine maximale, et à cinq ans d’assignation à résidence. Le seul témoignage à charge utilisé a été celui d’un autre défenseur des droits humains, témoignage obtenu sous la torture. Le Dinh Luong est resté une année en détention sans aucun contact avec ses avocats, qui l’ont rencontré quelques semaines avant son procès.

Le 18 octobre 2018, sa peine a malheureusement été confirmée en appel. Le jour de l’audience, il a déclaré au tribunal : « L’Histoire jugera mes actes. Je suis heureux d’aller en prison si cela permet à mon peuple de connaître la liberté et la démocratie. » Alors que ce procès devait être public, seuls sa femme et son plus jeune frère ont été autorisés à entrer dans la salle d’audience. Les diplomates étrangers qui ont tenté d’y assister ont été exclus.

Selon l’organisme Front Line Defenders, des proches de Le Dinh Luong ont été battus par la police alors qu’ils tentaient d’en savoir plus sur sa situation. L’état de santé de Le Dinh Luong demande des traitements, mais les autorités refusent leur envoi par sa famille.

Contexte

Derrière l’image lisse et d’ouverture que le gouvernement souhaite donner, le Vietnam est le pays de la région qui criminalise le plus les défenseurs des droits de la personne. La répression s’est nettement accrue depuis 2016, avec l’arrivée au pouvoir d’une frange de dirigeants conservateurs et prochinois. Les améliorations récentes en matière de droits humains ont été le fait des pressions exercées entre autres par les États-Unis dans le cadre du Partenariat transpacifique, dénoncé par Donald Trump à son arrivée au pouvoir. La catastrophe de Formosa a également joué un rôle de catalyseur de la répression des personnes, de l’interdiction des manifestions et de la censure du Web dans le but de faire taire les contestations de l’inaction des autorités dans la prise en charge des conséquences.

Pour cela, le pouvoir recourt à des lois aux formulations vagues, laissant une grande place à l’arbitraire. Pourtant, le nouveau Code pénal entré en vigueur en janvier 2018 est censé protéger davantage les libertés individuelles (liberté d’association, d’expression et d’information) et renforcer l’interdiction de la torture.

Les défenseurs sont détenus à l’isolement, souvent au secret, durant la période d’enquête. Cela facilite et perpétue des pratiques tortionnaires en vue d’extorquer des aveux : passages à tabac, injections de produits psychotropes, pressions psychologiques intenses. Pour accentuer le sentiment d’impuissance et d’isolement, les autorités transfèrent des prisonniers dans des établissements extrêmement éloignés de leur famille. Une fois détenus, ils peuvent être encore soumis à la torture et à des traitements cruels.

Par de tels actes, le Vietnam contrevient à la Déclaration universelle des droits de l’homme, il viole de façon systématique le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié en 1982, et la Convention contre la torture ratifiée en 2015.

Ensemble, rappelons à Le Dinh Luong qu’il n’est pas seul, soutenons-le !

Cette action vous est proposée en relais d’une campagne lancée par l’ACAT France. Nous vous suggérons d’écrire aux autorités vietnamiennes, avec copie à leur Ambassade à Ottawa.

De son côté, le président de l’ACAT Canada interpellera en votre nom les autorités canadiennes et québécoises dans le cadre de leurs partenariats économiques avec le Vietnam. Une copie de l’action sera donc également envoyée à l’Ambassade du Canada au Vietnam, à Hanoï.


Vous pouvez agir

Lettre d’action en format .pdf : Lettre pour le Vietnam pdf 2019-04
Lettre d’action en format modifiable .docx : Lettre pour le Vietnam docx 2019-04


Sources

ACAT France. 2011. Un Monde tortionnaire, fiche pays sur le Vietnam. www.acatfrance.fr/public/umt/RT2011_Vietnam.pdf

ACAT France. 2019. Campagne « Vietnam, le connaissez-vous vraiment ? ». www.acatfrance.fr/CampagneVietnamleconnaissez-vousvraiment

Front Line Defenders. 2018. Le Dinh Luong on trial. www.frontlinedefenders.org/en/case/le-dinh-luong-trial

Human Rights Watch. 2019. Submission to the European Union ahead of the EU-Vietnam Human Rights Dialogue. www.hrw.org/sites/default/files/supporting_resources/euvn_human_rights_dialogue_2019.pdf